On reconnaît de plus en plus l'importance de l'architecture scolaire pour développer la qualité des relations, améliorer la transmission des connaissances et favoriser le plaisir d'apprendre.
Lorsque l’on évoque l’école « autrefois », vient à l’esprit le tableau noir de la salle de classe où sont groupés des élèves, chacun assis à son pupitre, le tout surveillé par le maître installé à son bureau, sur une estrade. Cet archétype est celui véhiculé par la loi Ferry de 1882 rendant l’instruction primaire obligatoire mais aussi laïque.
Bien qu’étant sans doute la plus connue, cette loi a été précédée d’autres, à commencer par la loi Guizot en 1833, instaurant la création d’une école publique ou privée dans « un local convenablement exposé » dans toutes les communes françaises de plus de 500 habitants.
Durant la première moitié du 19ème siècle, les écoliers sont encore entassés dans une pièce qui est souvent le logement du maître, sur des bancs, dispensés d’un enseignement individuel (l’enseignant faisant venir auprès de lui chaque élève) ou mutuel (grâce à des moniteurs répétant sa parole).
Nul doute que l’une comme l’autre de ces deux méthodes aient pu porter leurs fruits.
En 1834 cependant, Auguste Bouillon rédigeait le premier traité d’architecture scolaire en France : De la construction des maisons d'école primaire. Parmi les préconisations : cour, préau, couloirs, classes, etc.
L’enseignement : entre législation et préceptes
En 1882 s’instaure donc l’école telle qu’on l’imagine, représentée par « les hussards noirs de la République ». Avec l’extension de la durée de la scolarité, les effectifs augmentent et les besoins en bâtiments se font pressants. L’Etat participe financièrement aux constructions, faisant ainsi appliquer le « règlement pour la construction et l'ameublement des maisons d'école » arrêté par le Conseil Supérieur de l’Instruction public que préside Jules Ferry, et promulgué par arrêté ministériel en 1880.
Dans ce document d’une trentaine de pages, tout est détaillé, de l’emplacement de l’école à l’épaisseur des murs, en passant par les huisseries, les poêles, les urinoirs, le mobilier de travail, etc. Le tout accompagné de plans et croquis, permettant ainsi aux architectes de s’emparer d’un marché en devenir. Ces constructions, connues aujourd’hui sous le nom de « style Ferry », s’inspiraient des préoccupations hygiénistes de l’époque : cour arborée agrémentée d’un préau au rez-de-chaussée pour permettre aux élèves de se détendre durant les récréations ; aux étages, logements de fonction et salles de classes pouvant accueillir une cinquantaine d’élèves, éclairées par de grandes baies, présentant une hauteur sous plafond et une largeur conséquentes.
Nouvelles méthodes et conceptions de l’enseignement
Ce sont d’ailleurs ces mêmes principes hygiénistes qui donneront naissance dans les années 1930 aux écoles de plein-air » inspirées des cités-jardins anglaises où maisons individuelles, petits immeubles, commerces, dispensaire, gymnase, piscine et bien sûr école constituent un cadre architectural.
La loi Guizot prévoyant la mise en place de « salles d’asile » pour les enfants en bas âge des ouvrières, Marie Pape-Carpantier propose en 1845 de transformer l’usage social de ces lieux : ce sont les prémices de l’école maternelle qui ne verra le jour que vingt ans plus tard grâce à Pauline Kergomard, mettant au coeur de ce système l’éveil et le développement de l’enfant. Salles d’exercices, de repos, de propreté, vestiaires, réfectoires seront au coeur de ces nouveaux aménagements. Des principes finalement peu éloignés de ceux de Maria Montessori dont la « méthode » a néanmoins peu marqué les lieux d’enseignement dans leurs formes.
Les constructions d’après-guerre
Les années d’après-guerres sont celles du baby-boom : cet essor démographique associé à de grands chantiers de reconstruction du pays, à l’accès à l’enseignement supérieur et à l’ouverture à l’industrialisation s’accompagnent d’édifications d’un genre nouveau. Les écoles, collèges ou lycées deviennent monoblocs, répétitifs, semblables, quelle que soit la région dans laquelle ils sont construits et ce, par des entreprises de travaux publics, non plus par les artisans locaux. Les nouveaux matériaux, acier et béton, ont le vent en poupe et permettent les étages, les toits-terrasses, les ouvertures en bandeaux, les rez-de-chaussée sur pilotis, à l’image des préconisations de Le Corbusier.
Si les qualités hygiénistes sont toujours de mise, celles environnementales et d’inscriptions paysagères le sont moins. Dès la fin des années 1960, Mai 68 étant également passé par là, des réflexions naissent à ce sujet, tant sur l’aspect des établissements scolaires que sur leur organisation. Continuité entre les niveaux et intégration de salles spécifiques pour les cours pratiques mais aussi d’espaces de détente ou encore de bibliothèques, favorisent la notion de « vie scolaire » et la création d’un nouveau terme : la « cité scolaire ».
Un retour à l’originalité
Depuis, l’uniformisation n’est plus la norme, les architectes répondant par concours aux commandes des collectivités en tenant compte des matériaux utilisés et de leur performances énergétiques, associées à des formes permettant intégration paysagère et économie d’énergie, voire passivité des bâtiments. La fonctionnalité prévaut également, répondant aux besoins liés à l’enseignement diffusé, aux déplacements des élèves, au bien-être des occupants des lieux, qu’il s’agisse d’une école maternelle ou d’un lycée professionnel. Sans oublier l’accès aux nouvelles technologies, partie intégrante du quotidien scolaire connecté entre corps enseignant, élèves, parents, intervenants extérieurs et représentants des institutions.
Nous sommes loin du tableau noir, même si les grands principes du système éducatif national restent la liberté de l’enseignement, la gratuité, la neutralité, la laïcité et l’obligation scolaire.
Rédaction : Adeline Cueilleuse de mémoires
Les Points d'Intérêt qui sont présentés dans cet itinéraire concernent principalement des bâtiments neufs ou ayant eu une intervention architecturale contemporaine.
Voir aussi La Partie 2, dédiée aux équipements d'enseignement secondaire, général, professionnel et technique
Ressources complémentaires :
♦ Habiter nos territoires en Bourgogne-Franche-Comté : les mairies-écoles du XIXe siècle